Histoire

Notre-Dame des Blancs-Manteaux est un sanctuaire dédié à la vierge (Annonciation) depuis 1258, date de l’installation des « Serviteurs de la Sainte Vierge », et de la construction de la première église orientée Est-Ouest, le long de la rue des Blancs-Manteaux.

La communauté des Serviteurs de la Sainte Vierge a été fondée en 1223 à Marseille et a été approuvée en 1257 par le pape Alexandre IV. Elle n’est pas à confondre avec celle des Servites de Marie, qui a été fondée en 1233 par sept marchands de Florence, connus dans le calendrier liturgique comme les sept saints fondateurs des Servites de Marie, qui a été dissoute en 1276, après le concile de Lyon (1274). En effet, le concile de Lyon voulait exécuter les directives du concile précédent, le quatrième concile du Latran, qui avait interdit la création de nouveaux ordres religieux et avait ordonné la suppression de tous les ordres religieux non encore approuvés par le Saint-Siège. Le concile de Lyon n’a donc reconnu que quatre ordres mendiants. Les Servites de Marie ont toutefois été rétablis en 1277 par le Pape Jean XXI, et définitivement approuvés en 1304.

Les Serviteurs de la Sainte Vierge étaient habillés en blanc, tandis que les Servites de Marie, ceux de Florence, étaient habillés en noir… Leur vocation était la contemplation du mystère de l’Annonciation. Depuis leur présence, l’église des Blancs-Manteaux est dédiée au mystère de l’Annonciation. La communauté des Serviteurs de la Sainte Vierge est, elle aussi, dissoute par le concile de Lyon. Le roi Philippe le Bel donne leur monastère à l’ordre de saint Guillaume. Le 18 juillet 1297, le pape Boniface VIII autorise les Guillemites à prendre possession du couvent.

Plan historique des blancs manteauxAu XVIIème siècle, les Guillemites se fondent dans l’ordre bénédictin. En 1618 a lieu au couvent des Blancs-Manteaux le chapitre de fondation de la congrégation de Saint-Maur. Plus tard, le supérieur de la congrégation de Saint-Maur a habité à Saint-Germain des Près. Dès lors le prieuré des Blancs-Manteaux est en étroite relation avec Saint Germain des Près dont il constitue le noviciat. En 1685, pose de la première pierre de l’église actuelle et rénovation du convent. La Révolution supprime la Congrégation de Saint-Maur et les moines sont dispersés. En 1792, le couvent est réquisitionné par la municipalité. Plusieurs bâtiments sont détruits. Ce qu’il en reste est constitué en paroisse en 1802.

La quasi-totalité du mobilier est acquise par la paroisse et les curés successifs au cours du XIXème siècle. Pour en savoir plus, brochure du p. Latreille, en vente à l’accueil de l’église.

Les Blancs-Manteaux

Pourquoi Notre-Dame des Blancs-Manteaux ?

C’est la question qui vient spontanément sur les lèvres du visiteur.

Fondé en 1223 à Marseille, par un inconnu, dans un des faubourgs de la ville en bord de mer, comme semble l’indiquer le vocable de la chapelle auprès de laquelle ils s’établissent, Notre-Dame-d’Arène, ou des Arènes, les serfs de Marie avaient comme but d’honorer le  mystère de l’Annonciation ; ils portaient sur leur habit un «manteau blanc» et suivaient la Règle de Saint Augustin. 1 servite de Marie
Connaissant la faveur dont jouissaient les religieux à Paris sous le règne de Louis IX, ils voulurent, eux aussi, être bénéficiaires des libéralités du saint Roi. Au retour de sa première Croisade, en 1254, ils lui demandèrent l’autorisation de s’établir dans la grand’ville.
Saint Louis donna son accord, mais il lui fallut aussi obtenir ceux de Renaud de Corbeil, évêque de Paris, du curé de Saint-Jean-en-Grève, sur le territoire duquel se trouvait le terrain que leur réservait le Roi, enfin celui de Robert, abbé du Bec-Hellouin, parce que la maison était à sa collation.
Le terrain se trouvait au nord-est, à l’intérieur des remparts du Paris de Philippe-Auguste, au pied d’une tour de guet près de la porte Barbette, qui ouvrait la porte de la Petite-Parcheminerie sur la Vieille-rue-du-Temple. Ce terrain parut insuffisant au Roi, il intervint encore auprès d’Amaury de la Roche, grand-maitre des Chevaliers du Temple, pour qu’il leur donnât un terrain parallèle au leur, de l’autre côté du mur d’enceinte, avec l’autorisation d’y percer une porte. Ce qui fut accordé avec une rente annuelle de 40 sols.

Fouille tour Philippe-Auguste
Fouille mettant à jour une base de tour de la muraille de Philippe-Auguste, au début du XXème siècle.

Les Serfs de Marie s’installèrent en 1258, ils construisirent un monastère. L’église, orienté le long de la rue de la Petite-Parcheminerie, l’actuelle rue des Blancs-Manteaux, fut construite sur les plans d’Eudes de Montreuil, vraisemblablement dans un style analogue à celui de la Sainte-Chapelle.
Leur existence devait être courte. En 1274, le II° Concile œcuménique de Lyon, sous le pontificat de Grégoire X, décrète la dissolution d’un bon nombre d’ordres mendiants, dont les Blancs-Manteaux. Pourtant, il faudra attendre 1298 pour voir Boniface VIII et Philippe le Bel donner le monastère aux Guillemites, qui logeaient à Montrouge, dans un couvent dit des Macchabées.
Si, après quarante ans, les Serfs de Marie au Manteaux Blanc disparurent le nom que le peuple de Paris leur avait donné est resté jusqu’à nos jours : « les Blancs-Manteaux », ainsi que le culte voué à la Vierge de l’Annonciation dans le quartier
Notre-Dame des Blancs-Manteaux est, vraisemblablement, à Paris, avec la Cathédrale et après elle, le sanctuaire le plus ancien voué à Notre Dame.

Les Guillemites

Le peuple de Paris les appela les «mal-nommés» : ils portaient l’habit noir des Bénédictins ; il continua cependant de les appeler les «Blancs-Manteaux»…
Ils tirent leur nom de celui de leur fondateur, le bienheureux Guillaume de Malval (ou Maleval) dont on célébrait encore, au XIX° siècle, la fête au propre paroissial à la date du 10 février.
Sur Guillaume de Malval, les Bollandistes sont peu diserts. Chevalier, il eut une vie déréglée jusqu’au jour de sa conversion. Alors il se fit ermite après un pèlerinage, en Terre Sainte vraisemblablement ; il vint s’établir dans une vallée déserte, sur le territoire de Sienne, appelé en français Malle-Vallée, Mal-Vallée d’où le nom de Malval ajouté à celui de Guillaume, pour le distinguer d’autres Guillaume chevaliers, et pas plus recommandables avant leur conversion. Mort en 1157, ce n’est que sur sa tombe que la nouvelle famille religieuse devait se développer, pour se répandre en Italie, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas : le nom de «Guillemins» donné à une gare de Liège en est le souvenir.
En 1256, on trouve donc les Guillemites installés à Montrouge, c’est de là qu’ils seront transférés par la bulle pontificale du 12 septembre 1297 et ordonnance royale de 1298 au monastère des Blancs-Manteaux. Ils y resteront jusqu’à l’exécution du décret du Concile de Trente ordonnant aux petits ordres de se fusionner avec le grand Ordre, dont ils suivaient la règle.
L’historien Guillebert de Metz, né vers 1355, auteur d’une Description de Paris était un Guillemite du monastère des Blancs-Manteaux.
Vers la fin du XIV° siècle, l’église primitive tombant en ruines, ils en firent construire une nouvelle. Elle fut consacrée solennellement le 30 novembre 1397 par Jean de Gonesse, évêque de Nassau, ancien prieur des Blancs-Manteaux, où il résidait, en présence du roi Charles VI, de Charles VII, roi de Navarre, de quatre évêques.
C’est dans cette église que fut déposée la dépouille de Louis, duc d’Orléans, assassiné le 25 novembre 1407 par son cousin Jean sans Peur, duc de Bourgogne, à quelque distance du croisement de la rue Vielle-du-Temple et de la rue des Francs-Bourgeois, alors qu’il venait de quitter la reine Isabeau de Bavière, qui habitait non loin de là en son hôtel Barbette.

Le prieuré bénédictin des Blancs-Manteaux

Dès 1610, pour obéir à l’ordonnance du Concile de Trente, les Guillemites entrèrent en relation avec le prieuré bénédictin de Saint-Faron, au diocèse de Meaux, fondation récente de la célèbre réforme introduite en France par Didier de la Cour au monastère de Saint-Vannes à Verdun, plus connue sous le nom de Congrégation de Saint-Maur.
Avec l’autorisation de Paul V et licence de Louis XIII, encouragés par le cardinal Henri de Gondi, évêque de Paris, Jehan Gohier, prieur des Blancs-Manteaux, et Martin Tesnier, prieur de Saint-Faron, concluent un pacte d’association.
En 1618, les moines bénédictins arrivèrent donc à Paris. Le prieuré des Blancs-Manteaux devait ainsi se rajeunir et prendre jusqu’à la Révolution de 1789 un essor qui devait le rendre célèbre, digne émule de la vieille abbaye de la rive droite, Saint-Germain-des-Prés. C’est là que fut installé le noviciat de la nouvelle congrégation qui, renonçant alors au patronyme de Saint-Vanne, prit celui de Saint-Maur, en mémoire d’un des plus illustres disciples de saint Benoît.
Les années passant, le monastère primitif devait se révéler à la fois trop étroit et trop vétuste. Il fut donc décidé de construire de nouveaux bâtiments. Charles Duval, architecte et maître maçon, fut chargé de dessiner le nouveau monastère et son église et d’en mener à bien la construction. La première pierre fut posée le 26 avril 1685 par le chancelier Michel Le Tellier, père de Louvois, et sa femme Elisabeth Turpin.

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Plan du monastère des Blancs-Manteaux, dans le Supplément au Monasticon Gallicanum
Intérieur église mauriste
Projet d’aménagement de l’intérieur de l’église, dans le Supplément au Monasticon Gallicanum

C’est l’église actuelle qui formait le côté ouest du cloître, le côté est formant les bâtiments conventuels. Y eut-il un côté sud ? Si l’on s’en tient à une gravure de 1791, dessinée par Garneray, il ne semble pas, mais il y avait un mur avec une entrée monumentale.

Consultez la page des Blancs-Manteaux sur le site de l’Association des Abbayes et prieurés Mauristes.

Consultez les archives des Mauristes

blancs manteaux Monasticon
L’abbaye de Notre-Dame des Blancs-Manteaux, dans le Monasticon Gallicanum, gravure réalisée entre 1685 et 1694, et éditée en 1870.
Monastère côté Francs-Bourgeois
Monastère des Blancs-Manteaux, vu de la rue des Francs-Bourgeois, dans le Supplément au Monasticon Gallicanum

Ce fut un centre d’érudition jusqu’en 1790, quand l’Assemblée Nationale décida sa suppression. Le 10 février 1791, en la fête du bienheureux Guillaume de Malval, le bibliothécaire de la Vile de Paris, Ameilhon, vint, au nom de la Municipalité, pour se saisir de la bibliothèque. Il trouva Dom Rial, Dom Deforis, l’éditeur des œuvres de Bossuet, Dom François Clément, qui continuait l’Histoire littéraire de la France, pour ne citer que les plus célèbres à l’époque, travaillant au milieu de 20 000 volumes, sans compter des manuscrits et des archives, qui constituent un des fonds les plus importants de la Bibliothèque Nationale et des Archives Nationales.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6947659t
Drapeau du Bataillon des Blancs-Manteaux. Source : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6947659t

Les bâtiments conventuels servirent d’abord de caserne, pour abriter le Bataillon des Blancs-Manteaux de la Garde Nationale.

Puis les bâtiments claustraux et l’église furent vendus le 12 vendémiaire et le 8 prairial de l’an V, soit le 30 octobre 1796 et le 27 mai 1797. La partie jouxtant le Mont-de-Piété, Crédit Municipal actuel, lui échut. L’église et ses dépendances furent loués 3 000 francs par an comme salle de réunions, et même comme lieu de culte.
De nos jours, il ne subsiste rien sinon l’église et ce qui forme l’actuel presbytère, c’est à dire trois fenêtres sur seize qui s’ouvraient sur la face nord, ainsi que la partie du Crédit municipal, reconnaissable à son rez-de-chaussée, dont les fenêtres s’ouvrent, comme celles du presbytère, dans un arc en plein cintre.

La paroisse Notre-Dame des Blancs-Manteaux

Avec le Concordat, signé le 15 juillet 1801, commence une ère nouvelle pour les Blancs-Manteaux. D’église conventuelle, après avoir servi de salle de réunions, de grange, d’oratoire, elle va devenir église paroissiale.

Notre-Dame des Blancs-Manteaux comme paroisse commence à exister en mai 1802.

Eglise en 1808
L’intérieur de l’église en 1808, dans : J. M. B. BLINS DE SAINT-VICTOR, Tableau historique et pittoresque de Paris, éd. H. Nicolle & Le Normand, Paris, 1808-1809.

Pierre-François Tinthoin, né à Paris le 28 février 1751, est professeur en Sorbonne en 1790. Il refuse le serment, émigre en Angleterre de 1792 à 1796, puis Ecosse jusqu’en 1800, débarque en juillet à Rotterdam, prête serment à la Constitution civile du clergé, obtient sa radiation de la liste des émigrés.
En mai 1802, il est desservant de Notre-Dame des Blancs-Manteaux, succursale de Saint-Merry ; il en devient le premier curé le 12 frimaire de l’an XII (4 décembre 1803). Le 20 février 1806, le cardinal de Belloy, archevêque de Paris, le nomme chanoine titulaire et pénitencier, membre du Conseil archiépiscopal. Il fait ses adieux à la paroisse le 6 avril 1806 ; il mourra le 13 mai 1826.
Son successeur, Martin Dessaubaz, né le 14 avril 1750, refuse le serment, se cache à Paris, est arrêté en avril 1793 et absous par le Tribunal révolutionnaire le 17 avril. Après avoir été nommé curé des Blancs-Manteaux le 14 avril 1806 et installé le 17 du même mois. En 1815, il est nommé et installé le 7 novembre curé-archiprêtre de la Cathédrale. Démissionnaire le 21 novembre 1821, il meurt le 11 août 1822.
Le troisième curé, Jacques Hinaux, est né à Bucy-le-Long, dans le diocèse de Soissons, le 22 octobre 1748. En 1790, il est curé de sa paroisse natale. Refusant de prêter le serment, il subira une longue détention au Temple ; Après différents ministères à Paris, il est nommé le 7 novembre 1815 curé des Blancs-Manteaux et installé le 16 du même mois. Il tombe bientôt malade, ne se relèvera pas et mourra le 17 décembre 1817.
Jacques-Henry Rudemare est né à Paris en 1758. Jeune prêtre, en 1788, il fait partie du clergé de Saint-Germain l’Auxerrois, chargé de l’administration des sacrements ; il refusera le serment et quittera Paris pour les Pays-Bas le 7 février 1791.
En 1802, on le retrouve en France ; le 9 avril 1807 il signe : Chanoine honoraire, promoteur général de l’Archevêché de Paris.

Consultez la liste des curés de la paroisse.

Dans la rue des Blancs-Manteaux

Sur des paroles de Jean-Paul Sartre, musique de Joseph Kosma, écrite en 1944 pendant la Seconde Guerre mondiale. Cette chanson évoquant la mise en place des outils de la peine de mort, à savoir l’échafaud et le bourreau, fait référence à la Révolution française et est une dénonciation de la peine capitale par Sartre.

D’abord chanté par les Frères Jacques, elle obtient son succès grâce à Juliette Gréco qui immortalisa la chanson.

Dans la rue des Blancs-Manteaux

Ils ont élevé des tréteaux
Et mis du son dans un seau
Et c’était un échafaud
Dans la rue des Blancs-Manteaux

Dans la rue des Blancs-Manteaux
Le bourreau s’est levé tôt
C’est qu’il avait du boulot
Faut qu’il coupe des généraux
Des évêques, des amiraux,
Dans la rue des Blancs-Manteaux

Dans la rue des Blancs-Manteaux
Sont venues des dames comme il faut
Avec de beaux affûtiaux
Mais la tête leur faisait défaut
Elle avait roulé de son haut
La tête avec le chapeau
Dans le ruisseau des Blancs-Manteaux.